Friday, 12 September, 2025
London, UK
Friday, September 12, 2025 10:23 AM
scattered clouds 17.3°C
Condition: Scattered clouds
Humidity: 62%
Wind Speed: 25.9 km/h

Les conseillers scientifiques de l’UE critiquent le projet de Bruxelles d’assouplir ses objectifs climatiques

BRUXELLES — Les conseillers scientifiques de l’Union européenne ont critiqué lundi le projet de la Commission d’externaliser une partie des efforts climatiques des Vingt-Sept à des pays plus pauvres.

Le Conseil scientifique consultatif européen sur le changement climatique, un organe indépendant chargé de formuler des recommandations en matière de politique de lutte contre le réchauffement climatique, a insisté sur le fait que l’UE devait atteindre son objectif de réduction des émissions pour 2040 uniquement grâce à des efforts sur son territoire.

“L’intégrité de l’objectif domestique ne doit pas être compromise par ces activités internationales”, a défendu son président, Ottmar Edenhofer, devant la presse lundi.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, ainsi que ses deux commissaires chargés des enjeux climatiques, Wopke Hoekstra et Teresa Ribera, ont promis une proposition visant à réduire de 90% les émissions de gaz à effet de serre de l’UE d’ici à 2040. Mais de nombreux gouvernements européens s’y sont opposés.

Wopke Hoekstra a alors retardé la présentation de cette proposition afin d’étudier des options pour offrir une plus grande marge de manœuvre aux Etats membres. La semaine dernière, il leur a annoncé que le texte, désormais attendu pour le 2 juillet, leur permettrait d’utiliser des crédits carbone internationaux pour les aider à atteindre l’objectif fixé. L’Allemagne, la France et la Pologne font partie des pays qui soutiennent cette approche.

Les scientifiques ne l’entendent pas de cette oreille. “Le Conseil consultatif ne recommande pas l’utilisation de crédits carbone internationaux pour remplacer les réductions d’émissions domestiques en vue d’atteindre l’objectif de 2040”, écrivent-ils dans le rapport de 60 pages publié lundi.

Si l’UE choisit d’acheter des crédits carbone, ceux-ci doivent s’ajouter aux efforts intérieurs, et non les remplacer, insistent les scientifiques. “Vous pouvez le faire, mais vous ne devez pas le faire en relâchant les objectifs domestiques”, a insisté Ottmar Edenhofer.

Ce rapport constitue une intervention sans précédent de la part des scientifiques. Bien que le Conseil consultatif ne critique pas ouvertement la Commission ou les gouvernements nationaux, il n’a jamais commenté de la sorte un débat politique en cours.

Ses avis se sont avérés influents par le passé. En 2023, il a recommandé à l’UE de réduire d’ici à 2040 ses émissions de 90% à 95% par rapport à leur niveau de 1990, ce qui a servi de base à la recommandation initiale de la Commission l’année dernière.

Dans le rapport publié lundi, les scientifiques insistent sur le fait que leur recommandation pour 2023 se réfère aux réductions de CO2 au sein de l’UE, tout comme les objectifs fixés par la loi pour 2030 et 2050.

“L’objectif de réduction des émissions de 90% à 95% recommandé par le Conseil consultatif est exprimé en termes domestiques, car il vise à placer l’UE sur une trajectoire réalisable, crédible et efficiente en vue d’atteindre la neutralité climatique d’ici 2050”, écrivent-ils.

“Viser un objectif plus bas ne compromettrait pas seulement les progrès de l’UE vers cet objectif, mais aussi sa durabilité, sa compétitivité à long terme et sa sécurité énergétique en ces temps d’incertitude géopolitique”, avertissent-ils.

Débats sur les crédits carbone

En vertu d’un cadre soutenu par les Nations unies et finalisé l’année dernière, les crédits carbone permettent à un pays de payer pour des projets de réduction des émissions dans un autre pays — en général, plus pauvre — et de déduire la réduction de CO2 de son propre bilan carbone.

Par exemple, un gouvernement européen peut financer des bus électriques en Thaïlande pour remplacer les véhicules à moteur thermique, puis utiliser le crédit carbone qui en résulte pour compenser ses propres émissions au lieu de réduire le CO2 généré dans son pays. (C’est ce que fait la Suisse.)

Les partisans des crédits carbone affirment que ces transactions ont un meilleur ratio coût-avantage que les actions nationales — financer des bus électriques en Thaïlande coûte moins cher qu’en Suisse — tout en permettant la même réduction des émissions. Elles aident également les pays les plus pauvres à accéder au financement de l’action climatique.

Les détracteurs — dont le Conseil consultatif — affirment que les crédits carbone sapent les efforts de réduction des émissions dans les pays riches et que des questions majeures d’intégrité subsistent.

“L’utilisation de crédits carbone internationaux pour atteindre cet objectif [2040], même partiellement, pourrait nuire à la création de valeur domestique en détournant les ressources de la transformation nécessaire de l’économie de l’UE”, ont alerté les scientifiques.

Les précédents systèmes de compensation des émissions de carbone et d’échange de crédits ont souvent échoué à produire des réductions d’émissions vérifiables, même si beaucoup espèrent que le nouveau cadre soutenu par les Nations unies améliorera leur crédibilité.

“Les crédits internationaux peuvent sembler efficients d’un point de vue global, mais ils comportent des risques importants pour les marchés du carbone et l’intégrité environnementale”, prévient le Conseil consultatif, qui note qu’il est beaucoup plus difficile pour l’UE de contrôler les efforts climatiques à l’étranger qu’à l’intérieur de ses frontières.

L’UE peut le faire

En dépit de défis toujours plus nombreux, allant de l’agression russe à l’inflation en passant par l’intensification de la concurrence économique, il est “faisable” pour l’UE d’atteindre un objectif de 90% à 95% chez elle, affirment les scientifiques.

“La réalisation de cet objectif par des mesures domestiques renforcera également la compétitivité à long terme de l’UE en accélérant l’innovation dans les technologies propres, en réduisant la dépendance à l’égard des combustibles fossiles et en stimulant les investissements dans les secteurs d’avenir”, écrivent-ils.

Un porte-parole de la Commission a déclaré que l’exécutif de l’UE se félicitait de la contribution du comité de scientifiques, ajoutant : “Alors que nous préparons la proposition [pour l’objectif de 2040] […], cette contribution du Conseil consultatif est un apport important pour ces réflexions et consultations.”

Reste à voir si le rapport influencera Bruxelles ou les Etats membres. Mais les critiques du Conseil consultatif compliqueront probablement les efforts de la Commission pour faire adopter rapidement l’objectif 2040, car la crédibilité climatique de l’UE repose en grande partie sur le fait que ses objectifs sont fondés sur des données scientifiques.

Un objectif de 90% partiellement atteint avec des crédits serait “moins crédible” et comporterait “des risques supplémentaires”, a prévenu Ottmar Edenhofer.

Lorsqu’on lui a demandé s’il avait un message à adresser aux gouvernements qui poussent pour les crédits carbone, Ottmar Edenhofer a répondu : “J’ai un message, et ce message est que 90% à 95%, c’est un objectif domestique, point final.”

Cet article a d’abord été publié par POLITICO en anglais et a été édité en français par Jean-Christophe Catalon.

LP Staff Writers

Writers at Lord’s Press come from a range of professional backgrounds, including history, diplomacy, heraldry, and public administration. Many publish anonymously or under initials—a practice that reflects the publication’s long-standing emphasis on discretion and editorial objectivity. While they bring expertise in European nobility, protocol, and archival research, their role is not to opine, but to document. Their focus remains on accuracy, historical integrity, and the preservation of events and individuals whose significance might otherwise go unrecorded.

Categories

Follow

    Newsletter

    Subscribe to receive your complimentary login credentials and unlock full access to all features and stories from Lord’s Press.

    As a journal of record, Lord’s Press remains freely accessible—thanks to the enduring support of our distinguished partners and patrons. Subscribing ensures uninterrupted access to our archives, special reports, and exclusive notices.

    LP is free thanks to our Sponsors

    Privacy Overview

    Privacy & Cookie Notice

    This website uses cookies to enhance your browsing experience and to help us understand how our content is accessed and used. Cookies are small text files stored in your browser that allow us to recognise your device upon return, retain your preferences, and gather anonymised usage statistics to improve site performance.

    Under EU General Data Protection Regulation (GDPR), we process this data based on your consent. You will be prompted to accept or customise your cookie preferences when you first visit our site.

    You may adjust or withdraw your consent at any time via the cookie settings link in the website footer. For more information on how we handle your data, please refer to our full Privacy Policy